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Récits de voyage
Récit : découverte de l'Estonie en paddle
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Après un report d’un an à cause de la pandémie, après un bon lavage du paddle, me voilà parti pour l’Estonie.
Au programme, une randonnée d’environs 350km sur 11 jours pour découvrir ce fabuleux pays mais aussi pour déposer la levée de fonds que notre association, Paddle for Earth, avait mis en place pour Estonian Fund For Nature. A cette occasion, je rencontrerai Mariliis Haljasorg en charge de la communication de cette organisation.
# La väike-emajõgi et le võrtsjärv
Réveil à 3h du matin, direction l’aéroport pour rejoindre l’Estonie. Comme je serai en autonomie, j’essaie de faire light mais je pars quand même avec 54kg répartis dans 3 sacs étanches. Mon SUP X900, mon chariot ainsi que mes 2 pagaies 900 carbone se contentent d’un sac. Le reste est consacré à l’équipement pour naviguer, au matériel de bivouac, aux changes et à la nourriture.
Après un transit par Tallinn, la capitale, j’arrive à Hummuli où je passerai ma première nuit. Trop hâte de naviguer, je gonfle mon paddle avec ma pompe à main facile 20PSI avant même de monter ma tente pour mon premier bivouac. Première nuit, premiers amis, les grenouilles ne me quitteront plus jusqu’à la fin du voyage. Elles me bercent, elles sautent sur la tente, squattent le paddle. Je pars à la recherche d’eau potable, ma consommation sera de 6l par jour entenant compte des repas.
C’est parti, le temps est frais mais sans plus, idéal pour une journée à pagayer. J’enfile mon gilet de flottaison 50N et donne mes premiers coups de pagaie. Plus j’avance, plus la pluie et présente et le vente forcit de plus en plus. Un bon vent N-NO, de quoi me faire une journée complète en upwind. Comme on dit, tout se mérite, alors on y croit. Pour cette première journée, j’avais prévu 35km et un début de navigation sur le Võrtsjärv. Au final, ça sera une mise en jambe de 24km, merci Tuule-Emä, déesse du vent, pour cet accueil. La Väike-Emajõgi n’est pas très large, cela permet de contempler le paysage sauvage et de croiser quelques oiseaux.
Une journée et une nuit sous le vent et la pluie, peut être que ça va s’améliorer ! Non, décidément, pas de chance mais le plaisir d’être là, seul dans ce magnifique paysage suffit à avoir le sourire aux lèvres. Le vent forcit encore. Dès l’entrée du lac, c’est le carnage, prise au vent des sacs, rame d’un seul côté, lac démonté, très choppy. Bref, ça me rappelle les conditions de l’Enfer de L’ouest 2022. La journée va être dure. Pas de possibilité de se mettre sous le vent donc je décide de tirer le plus droit possible afin de limiter les kilomètres. La rive est loin, pas de faune, bref, ce n’est pas ce qui aère le plus le cerveau. Bilan, 35km en 8h28. Là, je me dis que niveau perf, ce n’est pas terrible. Dur de sortir des référentiels de courses ou d’entrainements même si je ne suis pas là pour ça. A la sortie du lac, une maison d’hôtes, je prends la décision de m’y arrêter. Je discute avec la propriétaire des lieux, lui montre mon matériel .. Elle me demande ce que je mange en journée, je lui montre alors mes lyophilisés. Elle repart et quelques instants après revient avec un bocal d’aiguilles qu’elle a préparé. Recharge du moral, séchage des affaires, une douche chaude, que demander de plus.

# L’emajõgi et le lac peipsi
Ouverture des yeux, ouverture des rideaux…enfin le soleil. Le Võrtsjärv est juste magnifique. Pas de vent, la chance sourit à ceux qui savent attendre. Une belle journée de navigation en perspective.
Le but est de rallier l’entrée du lac Peipsi, le 4eme plus grand lac d’Euope, en 2 jours. Je débute donc ma navigation sur l’Emajõgi. Un petit courant portant, des reflets de soleil, j’ai la banane, ce petit sourire qui reste bêtement sur votre visage tellement vous vous sentez bien.
Les paysages défilent, la navigation est plus agréable que sur le Võrtsjärv, non pas à cause de la météo, juste car je retrouve plus de vie sauvage, surtout des oiseaux et la chance, un castor croise ma route. Toute le long de cette journée j’aperçois des habitats de castors.
Petite pause figues & amandes à Reku Paadi. Je croise beaucoup de chaises le long du rivage, elles sont là, dans des états souvent abimés mais elles servent, pour les pécheurs, car oui, définitivement l’Estonie est un pays où la pèche est omniprésente, toutes générations confondues.
Seul point noir, de petites cabanes de fortune, souvent aménagées avec des bâches en plastiques, bâches qui sont la plupart du temps en piteux état et contribuent à la pollution des rivages et de l’eau. A 5km de Tartu, je décide de m’arrêter pour bivouaquer. Demain c’est le grand jour, je rencontre Mariliis
La nuit sera fraîche, la pagaie, le sup, bref tout ce qui était dehors est gelé. Cela me rappelle ma randonnée en décembre sur la Somme. Après avoir fixé les sacs sur le SUP grâce aux multiples points d’attache, la X900 me porte jusqu’à Tartu, deuxième plus grande ville du pays où je rencontre Mariliis. Le quart d’heure de gloire aujourd’hui ou plutôt une partie de mon objectif pour ce projet. Je lui remets symboliquement un chèque un bois (rassurez vous, le virement est bien réel) du montant de notre levée de fond (un grand merci aux donateurs). Mariliis avait prévu un petit cadeau de son côté, une plaque de chocolat noisette pour remonter le moral. C’est l’heure de se quitter. Je quitte le ponton du Kayak Club de Tartu et repars vers Koosa Lõkkekoht Ja Metsaonn, zone de bivouac Natura 2000.
Ce bivouac sera surprenant. J’arrive sur place et pour un endroit isolé, il est rempli de tente, 2 bateaux, un appentis aménagé, bref, je ne serai pas seul. Des pécheurs estoniens sont là. Accueil très froid, voir glacial. Je gène, c’est clair. Comme on dit, le temps fait son office et cela se déride. Merci le traducteur du téléphone. Au final, la meilleure soirée de ma randonnée. Partage d’une soupe à la brême, partage de la vodka (je ne pouvais refuser, respect des traditions oblige). Ils ont été aux petits soins pour moi quand ils ont vu mon périple.
La nuit sera glaciale, l’Emajõgi gèlera même en surface. Après une petite heure et demi de rame, j’arrive sur le lac Peipsi. Il reste des blocs de glace qui dérivent tranquillement. En face de moi, c’est la Russie. Peut être une prochaine fois, là, direction Varnja pour un transit en bus pour Võru. La praticité de cette board est géniale, cette 14x31 retournera dans son sac de transport.
# Võhandu jõgi
Une petite journée off pour visiter Võru. Cette journée de repos fera du bien à mes mains qui commencent à avoir de plus en plus de bandages. Mauvais réflexe, avec tout ce vent de face, j’ai trop serré ma pagaie. On appelle ça l’expérience. C’est dans cette ville que ce tient chaque année le Võhandu Marathon. La Võhandu, c’est avant tout une grande fête. 1500 personnes, en kayak, paddle, aviron, vélo sur flotteurs, bref, c’est la fête. C’est la fête mais la course fait 100km tout de même. Pour moi, cela se fera sur 2 jours, je suis en randonnée, pas en race.
La Võhandu jõgi s’annonce plus calme que prévu. Un léger courant portant, très léger. C’est flat. La rivière est étroite, quelques arbres en travers mais ne bloquant pas la progression, de petits rapides sans risques, sans pierre cachée, ça avance, le but étant de faire une cinquantaine de kilomètres pour ce premier jour. Il faudra attendre le portage du barrage de Leevi pour trouver la partie la plus marrante avec des rapides plus engageant sans être du classe 3 non plus. Néanmoins, ça sera pour moi l’occasion de tester l’étanchéité de ma combinaison avec une petite chute dans un rapide. Eau à moins de 4 degrés, ça passe. Je rejoins un groupe de rafters qui étaient partis avant moi, avantage du SUP, c’est plus maniable et donc plus rapide dans cette rivière. Petite pause et discussion avec le groupe. En fait c’était une sortie associative avec des réfugiés Ukrainiens. Nous avons discuté une bonne demi-heure, partagé nos fruits & amandes. Pour moi, c’est la clé du partage, un voyage en duo n’aurait pas conduit aux mêmes moments d’échanges. Je poursuis ma descente et trouve dans un méandre un endroit pour bivouaquer. Le terme seul au monde prend tout son sens, c’est juste le top, le chant des oiseaux, le bruit de la forêt, de la rivière…magnifique.
Une nuit parfaite, encore une. Je peux dire que j’engrange des petits bonheurs sur cette randonnée. Le temps de ranger le bivouac et c’est reparti pour finir la Võhandu. Cette partie est redevenue calme. Toujours un paysage sauvage, quelques panneaux annonçant les distances restantes pour boucler le marathon. Un portage me coutera une partie de mon dos, un petit claquement en bas, pas grand-chose mais la douleur reste permanente. Petit changement sur la façon de pagayer pour limiter la douleur et c’est reparti. L’adaptation fait partie de l’expérience et sans casse matériel, pas de raison pour arrêter. J’arrive à Rãpina pour le denier portage. Je repère les lieux, un gars est assis sur les rocher avec sa bière. Il me dit de me mettre à l’eau ici. Après avoir transféré mon matériel, il m’aide pour mettre le paddle à l’eau. Nous discutons un peu et il m’apprend qu’il a fait le marathon la semaine dernière. Il trouve lui aussi que mon parcours est délirant et ne comprend pas pourquoi faire autant de kilomètres. Je rigole, la remarque vient d’une personne qui s’est fait 100km la semaine précédente en 8h de course. Je reprends mon parcours vers Võõpsu et je reviendrai sur Rãpina pour dormir et prendre le bus pour Kose-Uumõisa à 7h. La Võhandu Marathon sera bouclé en 13h15 en mode rando au final.

# Pirita jõgi, clap de fin
Grosse Journée de transit. J’arrive sur Kõse en milieu d’après-midi, c’était prévu dans le planning donc la navigation sera courte, juste le temps de s’éloigner un peu de la civilisation.
Quand je vois la rivière, la Pirita, je me dis que le niveau d’eau est franchement bas et la rivière bien chargée en branches, arbustes…
Je m’équipe et pars à la découverte de cette nouvelle rivière. Beaucoup, beaucoup d’arbres en travers, j’arrive globalement toujours à passer en me rapprochant de la rive ou en les faisant couler pour les plus petits. Beaucoup de déchets également bloqués par les arbres qui sont en travers. La navigation est donc sportive mais pas pour des raisons de rame. Après 2h de rame, je trouve un endroit qui me parait bien pour bivouaquer, juste dans un lacet. Je monte la tente, accompagné par une grenouille qui ne me lâche pas, qui sait, peut-être une princesse Estonienne...ou un prince, il vaut mieux ne pas l’embrasser donc !!! Le soleil se couche sur une journée principalement faite de transit, mais cette petite navigation m’a fait plaisir, elle me rapproche de mon but, arrivée sur Tallinn via la mer Baltique.
Nouvelle journée ensoleillée, je démarre et arrive sous un pont. Quelques pierres sur les rives, j’approche doucement, le milieu est dégagé, je passe et là, c’est le drame. Je prends un taquet, manque de tomber à l’eau et je sens que le tracking du paddle n’est plus le même. Je redoute une casse d’aileron, pire, du boitier. Des ailerons, j’en ai 2 autres dans le sac. Pour le boitier, la réparation ne peut se faire sur la rive.
J’arrive sur la berge, pas d’endroit sympa pour débarquer donc je saute dans l’eau à 4°, je m’enfonce dans la boue à mi mollets, du bonheur. Je sors les sacs du paddle, je le retourne et là, constat amer, le boitier est cassé, il ne tient que par l’arrière et fait drapeau dans l’eau. A défaut de complètement se lamenter, je me dis que c’est le moment de tester mon système de secours. L’aventure est faite d’imprévues que l’on essaie d’anticiper au mieux. Je monte donc mon système, quelques améliorations à prévoir au retour mais sur le papier, ça à l’air de fonctionner. Je me remets à l’eau, remonte les sacs et c’est parti. Bon, le tracking n’est pas au top mais il fait le job. Quelques mètres plus loin, de nouveau un arbre en travers, totalement infranchissables. Je me remets donc à l’eau, je sors les sac…. Et je me remets à l’eau. Le sourire s’efface quelque peu de mon visage, la journée va être longue. Quelques mètres plus loin, ça recommence, un arbre en travers infranchissable. Après avoir fait ça plusieurs fois, je décide que non, ça suffit, ce n’est pas du plaisir, ce n’est pas de la douleur dans l’effort, ce n’est pas se surpasser, c’est juste galérer pour galérer, sans intérêt. Je fais demi-tour et retrouve une route que j’avais vu quelques centaines de mètres avant. Cela sera donc 1km de marche avec tout le matériel pour prendre le bus direction Tallinn. Fin de l’aventure. Je me consolerai avec un morceau de chocolat que m’avait donné mon amie Kätlin le jour de mon arrivée à Tallinn.
Cette aventure aura été extraordinaire pour moi. L’alliance de l’aventure et du geste citoyen me booste. Cette randonnée sera un bon entrainement pour un autre projet, la Loire 725 que je ferai avec Sébastien Saulenc mais cette fois en race 14x27, la X900 étant plus orientée expédition. Il ne reste plus qu’à trouver les prochaines randonnées pour continuer de découvrir notre fabuleux terrain de jeu, notre planète.