Ce matin, le voyage bascule dans une autre dimension. Les motoneiges rugissent dans l’air glacé, tandis que nos pulkas, ces luges d’expédition chargées de vivres et d’équipement, sont harnachées avec soin. Nous laissons derrière nous les dernières empreintes de la civilisation pour pénétrer dans le massif d’Akinaaq, un désert blanc façonné par des millénaires de vents et de silence.
À l’horizon, la calotte glaciaire se dessine peu à peu, majestueuse, muette, écrasante. Des crêtes figées, des vallées sculptées par le temps : la grandeur du Groenland nous enveloppe. Surgit alors le fjord de Nunatarsuaq, prisonnier de la glace, figé dans son manteau hivernal.
C’est ici que commence notre aventure à pied. Nous établissons notre premier campement au bord de la banquise, aux portes de l’univers polaire.
Dans l’après-midi, nous explorons les environs pour une première immersion dans ce monde gelé, et installons le camp. C’est l’occasion d’apprendre les gestes essentiels de la vie en autonomie : monter sa tente dans le froid mordant, s’organiser avec son binôme, apprivoiser l’effort et surtout, le silence.
La nuit, nous dormons dans des tentes trois places aménagées pour deux, conçues pour résister aux rigueurs du climat. Une grande tente mess devient notre refuge collectif : autour du réchaud, les premiers rires, les échanges, la chaleur humaine s’installent.