En plein cœur du raid, alors que les corps ont trouvé leur rythme et que les gestes sont devenus automatiques, nous décidons de poser le camp pour deux nuits. Le lieu est idéal : un creux abrité entre deux reliefs, à proximité d’un petit cours d’eau prisonnier de la glace. L’endroit est sauvage, silencieux, parfait pour s’ancrer un moment dans cette immensité blanche.
Les tentes sont montées avec efficacité. Le camp s’organise vite : plateformes tassées dans la neige, réchauds installés, rituels du soir bien rodés. Cette pause logistique est aussi une opportunité rare : partir en léger, sans pulka. Laisser derrière soi le fardeau, pour retrouver la glisse pure, l’effort plus libre.
Le lendemain, nous partons avec un sac minimal : de quoi manger, boire, se protéger. Le pas est plus souple, la progression plus agile. La montagne s’ouvre autrement, plus accessible, plus intime. Nous remontons une vallée glaciaire bordée de parois ornées de cascades de glace, aux reflets bleutés presque irréels. Sous nos skis, la neige est légère, parfois soufflée par le vent, parfois immobile et profonde.
Un lac gelé s’étend au fond de la vallée, miroir parfait d’un ciel déjà rose malgré l’heure. On s’y arrête, silencieux, le souffle court, saisi par la beauté brute du lieu. Ici, on ne laisse rien, pas même une trace : seule l’empreinte intérieure restera.
De retour au camp, la lumière décline doucement. Les gestes redeviennent familiers : faire fondre la neige, allumer les réchauds, se glisser