Trek dans le Sarek : l'aventure à l'état brut

Le jour se lève sur Stockholm, ville posée entre terre et mer. Une escale urbaine avant de reprendre le train pour une traversée nordique vers la Laponie. Plus on avance, plus la nature se fait vaste, sauvage. Les forêts épaisses, les lacs miroitants, les maisons rouges perdues dans le vert. En fin de journée, arrivée à Gallivare, petite bourgade au seuil des montagnes. Ici commence une autre vie, plus simple, plus directe. Transfert pour rejoindre Viestas notre point de départ du trek.

Aujourd’hui, place aux derniers préparatifs. Les sacs à dos se remplissent petit à petit : duvet, popote, vêtements de pluie, ravitaillement… Tout doit trouver sa place. L’objectif : être autonome sans superflu, léger sans manquer l’essentiel.

On réapprend à plier son duvet en un rouleau compact, à répartir le poids entre dos et hanches, à faire tenir cinq jours de vie dans un sac de randonnée.

L’après-midi, on affine les réglages : longueur des bâtons, serrage des chaussures, technique de marche en montée, en descente. On partage les conseils, on échange les doutes, on se jauge doucement. Déjà, le groupe se soude.

Un moment est aussi consacré à la lecture de la carte, à l’orientation, à la sécurité en montagne. On parle de météo changeante, de gestion de l’effort, de respect du rythme de chacun.

C’est ici que commence véritablement l’aventure. On quitte Viestas, les sacs chargés pour une semaine d’autonomie. Le sentier s’élève doucement, serpentant entre les pins noueux et les mousses gorgées d’eau. Au-dessus, un ciel changeant, où les nuages se cherchent. Seuls résonnent les pas dans les flaques et le souffle calme de la forêt.

La marche est régulière. Quelques passerelles de bois enjambent des ruisseaux clairs. On aperçoit, au détour du sentier, une cabane perdue, un renne solitaire, ou une simple empreinte. En fin de journée, Sitojaure se dévoile entre les rochers : un petit refuge posée au bord du lac. On y passe la nuit, au chaud, le feu crépitant dans le poêle. Premier soir loin de tout.

On repart à l’aube, dans une lumière encore voilée. Le sentier détrempé traverse landes et tourbières. Par endroits, le sol vibre doucement, la tourbe respire. Les gués se succèdent sans difficulté, l’eau glacée file entre les pierres. Le vent, régulier, chasse les insectes.

Au loin se dresse Skierffe, falaise sombre qui domine la ligne d’horizon. Elle annonce l’entrée dans le Sarek, massif sauvage et silencieux. À mesure qu’on approche, le paysage devient plus vaste, plus brut.

En milieu d’après-midi, Aktse apparaît entre les arbres : quelques refuges en bois, et surtout, un panorama vertigineux sur la vallée de la Rapadalen. On y passe la nuit, enveloppés de calme, face à l’immensité.

Aujourd’hui, les sacs restent au refuge. L’ascension du Skierffe se fait à la journée, plus léger. Le chemin monte d’abord dans la forêt, avant de s’ouvrir sur les dalles rocheuses. Le vent se lève, la pente s’accentue, mais chaque pas rapproche du sommet.

Là-haut : un des panoramas les plus saisissants d’Europe. En contrebas, la Rapadalen déroule ses bras turquoise entre forêts et marécages, dominée par les glaciers du Sarek. C’est un moment suspendu.

On redescend vers Aktse pour une seconde nuit. Une journée brève en kilomètres, mais inoubliable.

Le camp est replié tôt. On quitte les hauteurs pour replonger dans la forêt boréale. Le sentier se faufile entre les lacs, les racines mouillées, les troncs tombés. L’ambiance est plus intime, enveloppée de mousse et de brume.

En fin de journée, on atteint Pårtestugan. Refuge simple, au bord de la rivière. On y retrouve les gestes familiers : suspendre les chaussettes humides, faire chauffer de l’eau, échanger quelques mots avec d’autres marcheurs. La chaleur du poêle apaise les jambes lourdes.

Dernière journée de trek. La forêt s’élargit peu à peu, les sentiers deviennent plus marqués, traversés parfois par des traces de quad ou des ponts de bois.

Puis, Kvikkjokk apparaît. Le refuge au bord de la rivière. Douche chaude, repas copieux, bière locale. On retrouve les objets du quotidien avec une certaine distance. Pas de célébration excessive, juste un relâchement profond. Le corps est vidé, mais l’esprit reste vibrant.

Après plusieurs jours de marche, une journée de sécurité s’impose pour souffler un peu. Depuis Kvikkjokk, on part tranquillement en direction du sommet de Rengård, une ascension modérée qui offre un panorama exceptionnel sur la Laponie environnante.

Le sentier s’élève doucement à travers la forêt boréale, jusqu’à la limite des arbres où le paysage s’ouvre largement. De là-haut, la vue embrasse les forêts immenses, les lacs étincelants et les montagnes lointaines. Une pause contemplative bienvenue, dans le calme retrouvé.

En fin d’après-midi, on redescend vers Kvikkjokk. De retour au refuge, on profite d’une seconde nuit confortable, laissant le corps se reposer pleinement avant la suite du voyage.

Le matin se lève doucement sur Kvikkjokk. Après une nuit au refuge, on savoure un petit-déjeuner généreux à la fjällstation, le temps de ranger soigneusement le matériel, plier la tente, et dire au revoir aux visages croisés au fil des jours. Les conversations s’égrènent, mêlant souvenirs d’étapes, conseils, et promesses de se revoir.

Bientôt, un taxi collectif ou un bus arrive, réservé à l’avance, prêt à nous conduire vers Gällivare, la porte d’entrée du Grand Nord. La route s’étire sur près de quatre heures, serpentant à travers des paysages sauvages et immenses. On traverse des forêts profondes, où les épicéas semblent toucher le ciel, et des villages silencieux, comme Jokkmokk, où le temps paraît s’être arrêté.

Peu à peu, la nature cède la place à la civilisation, mais la magie du Nord reste présente dans l’air. À l’arrivée à Gällivare en milieu d’après-midi, on profite de cette pause urbaine pour flâner en ville, faire quelques emplettes ou s’offrir un moment de détente au sauna, un bain de chaleur bienvenu après tant de kilomètres parcourus.

Le matin, on prend place dans le train SJ, prêt pour une longue traversée à travers la Suède. Le départ peut être tôt ou en début d’après-midi selon les horaires, mais le voyage s’annonce comme une aventure à part entière.

Pendant 15 à 17 heures, le paysage défile lentement : d’immenses forêts arctiques aux lacs paisibles du sud, en passant par la toundra infinie et les villages typiques de la Scandinavie. Le rythme est doux, propice à la lecture, à l’écriture dans le carnet de voyage ou à une sieste réparatrice.

Au fil des heures, le corps se détend, l’esprit absorbe les émotions accumulées. En fin de journée, ou parfois tard dans la nuit, on arrive à Stockholm. La capitale suédoise offre un contraste saisissant avec la nature brute du nord.

On rejoint un hôtel ou une auberge en centre-ville.

La matinée est libre, un dernier moment pour goûter à Stockholm. Flâner dans les ruelles pavées de Gamla Stan, visiter un musée, ou simplement prendre un café dans un petit café chaleureux. Une dernière promenade le long des quais, à observer les bateaux et la lumière sur l’eau.

Puis vient l’heure du départ en train, en fin de matinée ou début d’après-midi. La traversée de la Scandinavie commence : cinq heures vers Copenhague, puis encore quatre heures et demie vers Hambourg. Un voyage entre îles, ponts majestueux, et campagnes verdoyantes.

La soirée s’achève à Hambourg, dans un hôtel proche de la gare ou une auberge conviviale, le corps accueillant doucement le retour vers l’Europe centrale.

Dernier matin en terres étrangères. Après un petit-déjeuner en ville, le train nous ramène vers la France. Selon les correspondances, le trajet passe par Cologne ou Francfort, avant d’emprunter un ICE ou un TGV vers Paris.

En environ trois heures et demie, on rejoint la Gare de l’Est. L’arrivée en début d’après-midi ou en soirée marque la fin du voyage. Le corps est fatigué, les jambes lourdes, mais le cœur est grand ouvert, rempli de souvenirs, de paysages.